Ici, le sourire photogénique d’un directeur marketing devenu chef pâtissier; il y a un jeune ingénieur qui a « enfin trouvé un sens en plaquant tout » devenir apiculteur; là un ancien comptable penché sur son tout nouvel atelier de céramiste… Au cours des dix dernières années, il y a eu des dizaines d’histoires « belles » et « inspirantes » de reconversion radicale réussie de jeunes « cadres sup » dans les métiers manuels et artisanaux dans la presse, les médias et les étagères. Mais ces histoires de virage professionnel laissent souvent de côté les difficultés rencontrées et les parcours de recyclage plus tortueux.
« Les reconversions dans le métier sont devenues sexy, cela a dû jouer dans mon désir de sauter le pas. Mais je pense que j’avais finalement un peu peur de suivre la mode. »Dit Fiona Cohen avec un sourire. Ce Parisien de 29 ans s’était engagé dans un ébénisterie cap au lendemain du premier confinement de 2020. En question l’envie de changer d’air, d’ajouter à son quotidien un « âme supplémentaire ». Et puis le télétravail « avait accentué les côtés négatifs » de son poste de directrice de production dans le cinéma d’animation. Passionnée de couture et de bricolage, elle a quitté la fleur avec un pistolet. « Je me suis dit que je pouvais en faire mon travail, construire des tiny houses par exemple… »
« Mieux affirmer vos désirs »
Quelques stages plus tard, Fiona Cohen a dû se rendre à l’évidence : les ébénistes passionnés se sont rencontrés « a souvent beaucoup travaillé, avec des horaires beaucoup plus restrictifs que les miens, pour gagner deux fois moins. » « Et je ne pense pas que je veuille travailler plus qu’aujourd’hui. Je veux avoir des enfants un jour, leur consacrer du temps… », explique-t-elle. Maintenant de retour dans son secteur initial, mais à temps partiel pour continuer à travailler le bois pour son plaisir, pas une seconde ne jugerait négativement cette expérience qui lui a permis « pour se recentrer [sa] place dans son travail, et apprendre maintenant à mieux s’affirmer [ses] désire dans des missions qui [lui] sont confiés » et dans lequel elle trouve du plaisir.
Dans ses pérégrinations professionnelles, Fiona a été accompagnée par l’organisme de formation primaveras, spécialisé dans la reconversion professionnelle. Son co-fondateur et professeur à Centrale Supélec, Laurent Polet, rappelle que « L’artisanat, vers lequel 15 % à 20 % de nos étudiants souhaitent s’orienter, véhicule un symbolisme fort et des fantasmes ». Surtout parmi les plus instruits, y compris les emplois « peut être plus marquée qu’auparavant par une dimension très abstraite, ou intellectuelle, déconnectée de la réalité. Ce qui est susceptible de leur donner envie de bétonner… »
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