Yannick Sevenou, 52 ans, glisse son gros doigt sur la cicatrice d’1 centimètre qu’il a au milieu de la paume. « Là, je me suis tranché avec une guillotine de 180 ! » Montez ensuite au poignet : « Deux opérations du canal carpien du côté droit. J’hésite à me faire opérer du gauche. » Il saisit alors ses coudes. Épicondylite, des deux côtés. » C’est un trouble musculo-squelettique lié à des lésions des tendons de l’avant-bras. «Parfois, ça vire au rouge-violet, la douleur est terrible. »
Il y a aussi, cachée dans son chaume, juste au-dessus de sa lèvre, une cicatrice de six points de suture. « Il faisait -8°C, j’ai glissé : j’ai cassé le parpaing avec la boucheil dit. J’y ai laissé trois dents. » Il y a cette fois où il est encore tombé d’une échelle non sécurisée – « J’ai eu mon sacrum cassé à quatre endroits. » Cette double hernie discale qu’il espère faire reconnaître en maladie professionnelle. Et ce suivi en pneumologie, puisque ces « deux cuillères à soupe » de sang craché d’une carafe.
Autant de stigmates de sa carrière de plombier tuyauteur, aujourd’hui pour la Setha (où il est également délégué CGT), filiale de Veolia spécialisée dans le nettoyage des égouts, réservoirs, châteaux d’eau. Une mission de santé publique, en somme. Qui nécessite de travailler dans des endroits exigus, nauséabonds, en hauteur ou souterrains, par tous les temps et à toutes les températures, de manipuler des outils ou des produits dangereux pour nettoyer les canalisations, de l’acide, de l’eau de Javel, d’être au contact d’amiante, de poussière de silice ou de matières fécales.
Cependant, aucun de ces « risques professionnels » a été jugé suffisamment élevé pour lui permettre d’acquérir des points de pénibilité sur son compte professionnel de prévention (C2P). Sauf si vous pouvez prétendre à une « incapacité permanente » de travail d’au moins 10% « grâce » à ses accidents du travail, ou à la reconnaissance d’une maladie professionnelle, ces dures conditions de travail ne lui permettront donc pas de partir en retraite anticipée.
Dix facteurs initiaux
Ce ne sera pas le cas non plus avec la nouvelle réforme, qui ne lui prévoit aucun traitement de faveur : même les travailleurs en « incapacité » reconnue seront prolongés de deux ans supplémentaires – ils partiront à 62 ans plutôt qu’à 60 ans. « Quand on travaille dans les égouts, il n’y a pas de machine qui passe, on porte tout sur les épaules, on travaille à la masse. Parfois, il faut actionner le marteau-piqueur au-dessus de l’épaule pour atteindre les tuyaux. Vous vous cassez le dos, les reins, les bras, tout ! Mais ce n’est pas considéré comme un travail fastidieux ! »il affirme.
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