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En 1910, une des premières lois visant à instaurer les retraites est qualifiée par la CGT de « mesure pour les morts » : à cette époque, 94 % des travailleurs n’atteignaient pas 65 ans. Mieux vaut donc revendiquer la journée de huit heures… C’est pourquoi, plutôt que de parler de retraite, Paul Lafargue, dès 1880, revendique Le droit à la paressesuperbe blague pour mieux favoriser une réduction drastique de la durée journalière de travail.
Si l’on associe souvent la longueur des jours, la pénibilité et la continuité du travail jusqu’à la mort à l’industrialisation du XIXe siècle, les journées de travail sont très longues depuis bien plus longtemps, en ville comme à la campagne. Les grandes usines textiles du XVIIe sièclee siècle se sont transformés en horaires déjà éprouvés deux à trois siècles plus tôt : de treize à quatorze heures de travail par jour de travail, avec des normes de productivité exigeantes. Lorsque les ouvriers ne peuvent plus les satisfaire, ils sont déclassés vers des tâches moins pénibles mais moins rémunérées. Les institutions familiales et caritatives sont le seul recours quand leur force leur fait défaut. Pas de retraite, sauf pour les anciens militaires ou certains vieux serviteurs de l’Etat.
L’industrialisation ne fait que grossir le nombre de travailleurs soumis à de tels rythmes. C’est à 40 ans pour les hommes et 35 ans pour les femmes que l’on gagne le mieux sa vie dans les filatures de coton vers 1890. Ensuite, plus on vieillit, moins on est rémunéré. La durée journalière du travail reste de douze heures effectives dans les industries depuis le décret du 9 septembre 1848, et cela environ deux cent quatre-vingts à deux cent quatre-vingt-dix jours par an. Ce décret est l’un des premiers signes, timide, de l’intervention de l’État dans les questions sociales.
Mais entre fraudes, exceptions légales et secteurs ignorés par la loi, on retrouve tout de même environ 1880 travailleurs qui ont atteint des maximums similaires à ceux du début du siècle ou dans l’Europe préindustrielle, soit 3400 à 3700 heures par an – contre 1500 aujourd’hui. ! Bien sûr, beaucoup ne fonctionnent que par intermittence. Mais quand le travail presse, ils ne comptent plus leurs heures. Le raisonnement par les moyens trouve ici ses limites.
Vision tripartite de la vie
D’autant que la définition des plannings n’est rien sans analyser le contenu du travail. L’intensification des gestes n’a pas attendu l’industrialisation : la machine dicte son rythme, les cadences augmentent avec le progrès technique et demandent des efforts accrus. Laboratoire de modernité, le spinning, par exemple, demande une mobilisation plus intense des corps et de l’attention. L’intensification concerne aussi des secteurs peu touchés par la révolution mécanique. Dans la mine, dans le bâtiment, dans les industries du feu, les modes de rémunération (dégustation et marchandage) sont faits pour mettre les ouvriers en concurrence, tandis que la distribution, à partir des années 1870-1880, du petit matériel (les machines à coudre, par exemple) fait du travail domestique à la pièce le pendant épuisant de l’usine. La difficulté de travailler est ainsi parfois beaucoup plus grande à la fin du XIXe siècle.e siècle qu’à ses débuts.
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