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ReportageUne vie en costume au volant d’une grosse berline, de bons revenus, pas de hiérarchie. Fin 2011, Uber se lance en France et ouvre des perspectives d’ascension sociale à des milliers de personnes issues des quartiers populaires. Dix ans plus tard, le bilan est amer, mais l’expérience utile.
C’est une histoire de frères, cousins, voisins, amis tous séduits par une promesse que Boubekeur, plantée, ce 7 avril, sur le terre-plein de la place d’Italie, à Paris, résume ainsi : « On nous a dit : « Vas-y, achète ta voiture pour 40 patates et, tu verras, tu seras indépendant » ! » « Nous » désigne à la fois l’entourage de ce chauffeur de VTC (voiture de transport avec chauffeur) de 43 ans et une entreprise californienne, leader mondial du secteur : Uber.
Ce matin-là, quittant son appartement le 15e arrondissement, Boubekeur, qui préfère que son nom de famille ne soit pas mentionné, n’a pas ouvert l’application pour récupérer un client devant une entrée cochère ou à la sortie d’un aéroport. Il s’est garé en double file lors d’un rassemblement VTC pour protester, entre autres, contre les plateformes qui « exploiter » chauffeurs, tandis que le prix du carburant s’envole. Des événements récurrents ces dernières années, mais avec un succès modeste.
Autour de Boubekeur, recroquevillé dans sa doudoune, une cinquantaine de chauffeurs avaient fait le déplacement en milieu de matinée. L’homme (presque dix ans d’ancienneté chez Uber) surveille des dizaines d’autres VTC circuler dans les rues de Paris, insensibles aux appels à la grève. « Certains sont nouveaux dans le métier, je les comprends, il glisse. Je peux critiquer Uber, je travaille toujours avec… Je sais qu’il y a un paradoxe. » Au fil des ans, ses revenus ont chuté parce que « Uber a fait venir de plus en plus de chauffeurs. » « Les parts du gâteau ont rétréci, regrette-t-il en joignant les mains. Mais il reste le leader mondial. Si nous voulons des courses, nous devons passer par lui. »
Une arrivée controversée
Uber a débarqué en France il y a dix ans, en décembre 2011. Un chien dans un jeu de boules jusque-là ordonné en deux grandes familles, régies par une législation distincte. D’une part, l’univers dit « big discount » : un service haut de gamme de location de chauffeurs privés en costume-cravate-berline, destiné à une clientèle très privilégiée ou professionnelle. De l’autre, les taxis. Uber commence par concurrencer le premier marché, puis le second.
La plateforme a suscité d’innombrables polémiques, de l’interdiction en 2015 d’UberPop, un service d’achat proposé par des particuliers, à une enquête – toujours en cours – de l’Urssaf et de la gendarmerie pour « travail dissimulé » lié au statut d’indépendant des chauffeurs. Il prend cependant ses aises en France au point d’offrir au Larousse un nouveau nom commun : « ubérisation ». Soyez là « la remise en cause du modèle économique d’une entreprise ou d’un secteur d’activité par l’arrivée d’un nouvel acteur proposant les mêmes prestations à moindre prix, réalisées par des indépendants plutôt que par des salariés, le plus souvent via des plateformes de réservation sur Internet ».
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