NE PASnous, on ne peut pas licencier un salarié pour insuffisance professionnelle parce qu’il a refusé de boire de l’alcool lors des apéros du week-end et ainsi intégrer la valeur « amusant et professionnel » de son entreprise – comprendre l’incitation à divers excès. Cet arrêt grotesque a été rendu par la Cour de cassation le 9 novembre 2022, contre le cabinet de conseil Cubik Partners, pour des faits remontant à 2015.
Au-delà de l’anecdote cocasse, ce jugement semble dans l’air du temps : comme pour ce salarié, une épidémie d’éloignement du travail sévit dans les entreprises françaises. « C’est un changement de paradigme qui ne cesse d’inquiéter », « une révolution qui ne dit pas son nom », « phénomène de retour à l’école »… Voici, pêle-mêle, les formules médiatiques qui ont qualifié la « arrêt tranquille »en français « démission silencieuse ».
Bien après cette rentrée, par mimétisme, difficile de nommer un consultant RH « compatible LinkedIn » qui ne se soit pas encore prononcé sur le sujet. la « arrêt tranquille »c’est la contrepartie automne-hiver 2022-2023 du « grande démission »élue meilleure expression fourre-tout de la saison printemps-été 2021 : alors que ceux qui peuvent sont partis en claquant la porte, le reste des salariés n’y pense pas moins.
Le paresseux du travail sans flamme
L’application TikTok a donné lieu à cette expression outre-Atlantique : en juillet 2022, un jeune américain expliquait en dix-sept secondes de vidéo son intention de ne faire que ce pour quoi il avait été embauché, ni plus ni moins. Le minimum syndical, parce que « le travail n’est pas notre vie ».
Mais alors, quoi de neuf ? Les analyses convergent pour rappeler que le moral des salariés – français notamment – n’est pas au top : perte de sens, fatigue, santé mentale en berne, faible reconnaissance de la hiérarchie, salaires rattrapés par l’inflation… Si tout cela Ça n’a aucun sens, alors pourquoi continuer à se tuer à la tâche et entretenir notre passion française pour le présentéisme ? Ainsi, 24 % des Français estiment que le travail est très important dans leur vie, selon une étude publiée le 11 novembre par la Fondation Jean-Jaurès en partenariat avec l’IFOP, contre 60 % en 1990.
la « la peste » touchent particulièrement les jeunes qui, c’est bien connu, « je ne veux plus travailler » – un peu comme chaque génération, selon celles qui la précèdent. Cette « génération désenchantée » a-t-elle la main poilue au travail ? Surtout, elle a la flemme d’être paresseuse, dans un monde du travail qui n’allume en elle aucune flamme : pour 37 % des 18-24 ans interrogés par l’institut BVA pour la Fondation Jean-Jaurès et la Macif à l’occasion de leur baromètre sur « Jeunes et Entreprises »l’idée de s’ennuyer et de ne pas s’intéresser à son travail provoque de l’anxiété.
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