Jthrombose, blocage, embolie… Les grands mouvements sociaux empruntent volontiers au vocabulaire cardiovasculaire. Qu’il s’agisse d’un corps humain ou d’un corps social, ils désignent la même chose : des flux qui s’arrêtent brusquement et menacent tout le système. Dans une société mobile et tertiarisée comme la nôtre, tout ce qui touche au transport est devenu sensible.
C’est pourquoi les grèves les plus spectaculaires, car les plus pénalisantes pour un maximum de personnes, sont celles qui touchent les moyens de transport – trains, avions et, bien sûr, la voiture, instrument existentiel de la vie. de tous ceux qui vivent hors des grandes villes, soit plus de la moitié des Français. Cela donne aux conducteurs de trains, aux conducteurs de camions, aux contrôleurs aériens ou aux exploitants de raffineries un pouvoir de négociation et un impact médiatique que de nombreux employés envient.
Que ce soit en 2000, sur la hausse du prix des carburants, en 2010, sur les retraites, en 2016, sur la loi travail, en 2019, sur les retraites ou, aujourd’hui, les syndicats de la raffinerie, et en CGT, s’appuient sur ce levier pour avancer, à au niveau national, leurs revendications en termes de salaires et de conditions de travail. Une théorie du ruissellement, cette fois assumée, qui voudrait que les gains obtenus dans ces catégories se diffusent ensuite au reste des entreprises. Position historique et affirmée. Ce fut la grande grève des mineurs d’Anzin (Nord), en 1884, celle de Germinalde Zola, qui a conduit à la création des premiers syndicats dans notre pays.
Petits arrangements catégoriels
Cette fois, le message est clair, le carburant des revendications n’est plus les retraites comme en 2019, mais l’inflation. Ce n’est pas une caractéristique française. Les États-Unis ont échappé, le 15 septembre, à une grève monstre dans le transport ferroviaire de marchandises, qui aurait bloqué tout le pays. Les syndicats ont obtenu une augmentation de 24 % de leurs salaires sur la période 2020-2024, dont 14 % dans l’immédiat. C’est ce dont rêvent les grévistes des raffineries françaises, qui s’appuient également sur les bénéfices colossaux réalisés par TotalEnergies ces deux dernières années. Une revendication que l’on retrouve dans la multitude de mouvements sociaux qui fleurissent depuis la fin de l’été.
C’est aussi ce qui alimente la crainte des employeurs : que tous les salaires soient, comme le salaire minimum, indexés sur la hausse des prix. Cela les obligerait soit à réduire leurs marges, ce qui serait risqué à la veille d’une récession économique, soit à augmenter leurs prix, ce qui alimenterait davantage l’inflation. On voit déjà comment toute l’architecture des bas salaires, qui concerne la moitié des salariés français, est bouleversée par la hausse du SMIC de plus de 7 % en 2022.
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