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Gouvernance. Le statut de victime a acquis une telle aura dans l’opinion des sociétés occidentales qu’il donne à ceux qui s’expriment en son nom un puissant moyen de pression sur la gouvernance des institutions. Loin d’être purement moral, le phénomène est un produit de la « sociétalisation », cette nouvelle manière de réguler les comportements en les soumettant aux injonctions de la société civile.
Le mouvement #metoo est un bon exemple du mécanisme. Longtemps considérés comme une expression « normale » de la différence de statut symbolique et pratique entre les hommes et les femmes, les comportements sexistes ont été dénoncés comme des manifestations abusives de la violence masculine.
Une telle reformulation a été rendue possible par ce que le philosophe américain John Dewey (1859-1952) a appelé la publicisation du sujet (Le public et ses problèmes, 1927), c’est-à-dire par la prise de conscience par les femmes que les actes machistes dont elles étaient victimes dépassaient les expériences personnelles et concernaient l’ensemble de la société. Ils banalisent les rapports de domination qui structurent un vivre ensemble intolérable.
Un savoir-faire exceptionnel
Depuis une décennie et aux côtés de #metoo, des groupes de discussion ont « médiatisé » de nombreux sujets : harcèlement physique et moral, abus d’autorité, manipulation psychologique, violences sexuelles ou domestiques, mépris des minorités et discriminations de toutes formes.
Suivant la même démarche, des actes individuels sont rendus publics pour dénoncer le système institutionnel qui rend invisibles les abus. La prise de parole à partir de cas privés ne vise pas à « briser le silence », comme on le dit souvent, mais au contraire à mettre des mots communs sur des comportements jusque-là inexprimés car négligés.
Fait politique nouveau, la publicité renverse aussi la logique classique démontrée notamment par René Girard (1923-2015) (Violence et sacré, 1972), qui fait de la victime le bouc émissaire passif de la violence publique. Au contraire, elle confère aux victimes une compétence exceptionnelle qui les autorise à prononcer publiquement une parole d’autorité. D’où la multiplication des discours victimaires et l’extension toujours plus large du périmètre des victimes, incluant désormais ceux du réchauffement climatique, les animaux menacés par la perte de biodiversité, les forêts ou la Terre elle-même, victime ultime de l’activité humaine.
Un climat instable
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