C’est l’archipel du plus beau lagon du monde et de la langueur océanienne. Pourtant, la Nouvelle-Calédonie ne donne plus envie. « Je cherchais depuis huit mois trois responsables administratifs et financiers. Je ne trouve personne, c’est un cauchemar à recruter »témoigne Romain Babey, le dirigeant d’une entreprise de produits d’hygiène et vice-président de la Fédération des industries de Nouvelle-Calédonie (FINC).
Son cas n’est pas isolé. A la tête d’une des principales agences de recrutement de Nouméa, Danièle Brault-Delahaie a une pléthore d’offres à son actif. « On me demande des ingénieurs, des comptables, des financiers, des mécaniciens, des chauffeurs, des maçons, des informaticiens, des échafaudeurs, des responsables RH… Même de simples vendeuses »décortique ce quinqua dynamique, dont les offres « dès le bac ont augmenté de 30% ».
Cette raréfaction des armes n’est pas due à une effervescence de l’économie – le PIB de l’archipel est en baisse depuis trois ans –, mais à un déclin démographique. Pour la première fois depuis quarante ans, l’Institut de la statistique et des études économiques (ISEE) a observé un solde migratoire négatif de 10 600 personnes lors du recensement de 2019, par rapport à celui de 2014. Et le phénomène se confirme dans la durée. années, de sorte que les experts estiment aujourd’hui l’exode à « environ 17 000 personnes » en huit ans, pour les trois quarts non originaires de Nouvelle-Calédonie. « La vie économique a toujours été faite de hauts et de bas, mais c’est la première fois que je vois un phénomène lourd et établi depuis environ cinq ans. Il n’y a plus de mouvements [de population] avec la métropole comme avant, et les étudiants calédoniens ne veulent pas revenir par manque de recul »s’inquiète Danièle Brault-Delahaie.
« Désert médical »
« Ce sont les gens compétents qui occupaient des emplois qualifiés qui sont partis »abonde Charles Roger, directeur de la Chambre de commerce et d’industrie, citant l’exemple du secteur bancaire où « 10% des emplois sont vacants ». Mais l’impact le plus explicite et aussi le plus dramatique de ces milliers de départs concerne la santé. « La Nouvelle-Calédonie est devenue un désert médical. Nous sommes dans une situation très grave, qui va durer plusieurs années et va coûter très cher alors que les déficits sociaux sont déjà énormes »s’alarme Joël Kamblock, cardiologue et membre du bureau du syndicat des médecins libéraux (SML).
Une enquête commandée récemment par ce syndicat a mis en lumière un tableau catastrophique : plus de la moitié des médecins généralistes et 67% des spécialistes en Calédonie ont plus de 55 ans, la densité de médecins généralistes libéraux est de 53,8 pour 100 000 habitants contre 78,9 en métropole. , et en cinq ans une vingtaine de praticiens ont fermé boutique, sans trouver de successeur. Dans le même temps, le nombre de malades de longue durée a augmenté de moitié pour atteindre le chiffre record de 17,5% de la population totale (271 000 habitants) alors que diabète, obésité et maladies respiratoires font des ravages.
Il vous reste 40,21% de cet article à lire. Ce qui suit est réservé aux abonnés.