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L’ambiance est studieuse dans la petite salle de formation nichée à la Bibliothèque nationale de France (BNF). Pour y accéder, il faut se repérer dans un dédale de couloirs et d’escaliers, mais les apprenants connaissent les lieux, parfois depuis plus de vingt ans. Ils sont employés par la société Samsic, qui gère la propreté du site François-Mitterrand. Ce jeudi matin de février, neuf volontaires travaillent avec Doris Mihailovici, formatrice d’Accentonic, dans le cadre d’une formation de 150 heures organisée par leur employeur, la BNF et l’association StopIllettrisme.
Depuis 2007, Dieneba Cissoko s’occupe des toilettes et des bureaux, de 13h à 20h. Arrivée du Mali il y a trente-quatre ans, et bien qu’elle sache lire, elle a encore du mal à écrire. « Quand je vois que quelque chose ne fonctionne pas, je ne peux pas laisser de note de transmission », regrette-t-elle. Pour ses démarches administratives, c’est sa fille « qui fait tout ». Or, « il est nécessaire que[’elle] apprendre à [s]e gérer » ! En face d’elle, Fatima Boumhaout, originaire du Maroc, peine à s’exprimer. Au quotidien, elle doit s’appuyer sur un de ses collègues qui parle arabe pour comprendre les consignes.
« Ce type d’entraînement est acrobatique », souligne Doris Mihailovici, qui doit jongler entre différents niveaux et attentes, tout en respectant le cahier des charges donné par la branche professionnelle du nettoyage, qui prévoit un certain nombre de compétences à acquérir et une certification en conséquence. L’AKTO, l’opérateur de compétences (OPCO) de la branche, finance la formation.
Approche pragmatique
Quelque 7% de la population âgée de 18 à 65 ans serait touchée par l’illettrisme, soit environ 2,5 millions de personnes, selon l’Agence nationale de lutte contre l’illettrisme (Anlci). « Et plus de la moitié sont employésnote Lamia Allal, chargée de mission développement des compétences et lutte contre l’illettrisme dans le monde du travail à l’Anlci. Cette situation complique l’accomplissement de leurs tâches et limite leurs possibilités d’évolution professionnelle. » Tous les secteurs d’activité sont touchés par l’illettrisme, même si certains – agroalimentaire, bâtiment, agriculture, industrie – comptent davantage de salariés concernés. « La difficulté réside dans l’identification, car ce sont des salariés qui, au fil des années, ont développé des stratégies de contournement. »
A la BNF, le point d’entrée pédagogique est » professionnel « : « Ce que nous étudions a un lien direct avec l’activité quotidienne des agents »note Doris Mihailovici. L’idée n’est pas de « donner des cours de français », mais pour permettre à chacun, quel que soit son niveau, d’acquérir des compétences de base : comprendre et s’exprimer à l’oral, lire, écrire, calculer, se repérer dans le temps et l’espace, utiliser les outils numériques. La formation se déroule sur le temps de travail – une demi-journée et une heure de tutorat par semaine – et nécessite « grande motivation ».
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