Jeudi 18 août, les trains britanniques étaient en grève et le trafic était fortement perturbé. Le lendemain, le métro de Londres était à l’arrêt. Deux jours plus tard, les trains étaient à nouveau bloqués. Dimanche, c’était au tour des dockers du port de Felixstowe, dans l’est de l’Angleterre, de déclencher un arrêt de travail de huit jours. Lundi 22 août, la colère s’est également emparée des avocats, qui ont voté à une très large majorité le renforcement du mouvement de grève qu’ils avaient lancé en avril. A Edimbourg, la capitale écossaise, après près d’une semaine d’arrêts de travail des éboueurs, les ordures s’amoncellent.
Presque chaque jour, le Royaume-Uni est confronté à un nouveau mouvement d’exaspération des salariés. « L’été du mécontentement », comme on l’a surnommée, a débuté en juin et tend à se durcir. C’est désormais la plus grosse vague de grèves depuis trente ans, même si elle reste pour l’instant loin de « l’hiver de la grogne » de 1979, qui avait tout immobilisé.
Cela dit, dans un pays qui n’a pratiquement plus connu de mouvements sociaux depuis les années 1990, il n’y a pas de grande manifestation ni de réelle coordination des actions. Devant les gares, quelques dizaines de manifestants sont parfois rassemblés, brandissant poliment une poignée de pancartes. Lundi, à Felixstowe, le plus grand port à conteneurs du royaume, moins d’une centaine de personnes en gilets fluo roses ou rouges ont fait une apparition sur les pelouses desséchées à proximité de leur lieu de travail.
Choc inflationniste
Le manque d’habitude vis-à-vis des grèves – à Felixstowe, ce n’était pas arrivé depuis trente ans – rend d’autant plus prégnant le mouvement généralisé qui semble s’emparer du pays. « Dans le port, les salariés ne sont vraiment pas des militants, souligne Robert Morton, représentant du syndicat Unite pour le secteur des transports. Mais ils ne peuvent tout simplement pas laisser leurs salaires être ravagés par l’inflation. »
Chaque débrayage a ses spécificités, mais tous se rejoignent sur un point : le choc de l’inflation, à 10,1 % en juillet outre-Manche (voire 12,3 % selon les indicateurs), est violent. Sur un an, la rémunération moyenne, primes comprises, avait augmenté de 5,1 % au deuxième trimestre, soit une baisse du pouvoir d’achat de 3 %. Il faut remonter à la crise financière de 2008 pour retrouver une chute aussi prononcée. Ce n’est probablement qu’un début : la Banque d’Angleterre s’attend à ce que l’inflation atteigne 13 % dans les mois à venir. Quant aux analystes de Citi, une banque américaine, ils tablent même sur 18% en janvier 2023.
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