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jeL’éducation doit-elle déboucher sur un emploi ou consiste-t-elle simplement à former de futurs citoyens ? Si la France n’a jamais vraiment réussi à dépasser cet éternel débat, c’est sans doute parce que la seule réponse valable est que le premier objectif est aussi important que le second. Or, les lycées professionnels ne réalisent ni l’un ni l’autre, d’où un immense déchet pour une partie non négligeable de la jeunesse. Dès lors, faire de la réforme de ces lycées professionnels un « cause nationale », comme annoncé le jeudi 4 mai, Emmanuel Macron, n’a rien de grandiloquent : c’est un devoir et une nécessité.
Le secteur cumule les difficultés en concentrant les élèves les plus fragiles socialement et académiquement. Une fois diplômés, seule une petite moitié trouve un emploi au bout d’un an. Ce bilan n’est pas supportable. C’est le fruit de plusieurs décennies de réformes mal calibrées, de budgets bancals et d’un système incapable de se remettre en cause malgré l’absence de résultats.
Souvent choisi par défaut, le lycée professionnel a fini par devenir pour beaucoup d’élèves une « voie de garage » ne permettant, dans l’indifférence générale, ni poursuite d’études ni insertion professionnelle. Au bout du compte, une population peu diplômée, oubliée, se sentant déclassée et devenue l’un des principaux terrains de chasse électoraux du Rassemblement national.
Un « pacte » avec les enseignants
La réforme propose une série de changements autour de deux piliers. L’un concerne l’amélioration de l’employabilité. L’objectif est d’adapter la formation au potentiel du bassin d’emploi local. Le projet se veut transparent sur les opportunités de formation et prévoit de fermer celles qui présentent les taux d’intégration les plus bas. L’idée est pleine de bon sens. Reste à expliquer comment les enseignants concernés seront accompagnés. Enfin, pour mieux valoriser les parcours étudiants et réduire l’écart d’attractivité avec les centres de formation d’apprentis, il est prévu de rémunérer les stages. Ceux-ci seront plus nombreux en terminale.
Ces efforts en faveur de l’insertion professionnelle sont les bienvenus, mais ils ne doivent pas se faire au détriment du deuxième pilier de la réforme, à savoir l’amélioration des connaissances de base. C’est là que tout se complique, car l’équilibre dépendra de la manière dont il sera appliqué. Il s’agit d’établir un « pacte » avec les enseignants. Ces derniers pourront percevoir jusqu’à 7 500 euros bruts par an en échange de « missions » comme l’accompagnement d’étudiants en difficulté.
Objectif : « zéro abandon », promet le président. Mais, derrière le slogan, peu de détails. Si le volet insertion est balisé et appelé à s’appliquer uniformément, celui concernant la consolidation de la formation générale variera en fonction de l’engagement des enseignants. La proportion de ceux qui sont prêts à accepter le « pacte » déterminera en partie l’efficacité de la réforme. D’une part, le risque est de créer un système à deux vitesses entre les lycées qui joueront le jeu et ceux qui refuseront. D’autre part, c’est l’occasion de mettre les enseignants face à leurs responsabilités et jouer sur l’effet d’entraînement.
Grâce à une enveloppe de 1 milliard d’euros par an, M. Macron souhaite « continuer à créer davantage de liens entre le monde de l’éducation et le monde de l’entreprise, en partant du principe que le lycée professionnel est une troisième voie ». Mais celle-ci ne pourra s’affirmer que si le secteur sait mettre au même niveau l’employabilité et la culture générale. A ce stade, il est difficile de savoir si cet équilibre essentiel sera respecté.
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