De mémoire d’ouvriers, à Kistelek, on n’avait jamais vu de nouveaux collègues arriver d’aussi loin. Fin mai, pour la première fois dans l’histoire de cette petite ville de 7 000 habitants du sud de la Hongrie, une vingtaine d’Indonésiens ont débarqué pour aider les 200 ouvriers de l’usine de câbles électriques, actuellement débordés par les commandes. . « Nous avons expliqué à nos ouvriers hongrois que nous manquions tellement d’armes que la production risquait d’être bloquée ou qu’ils ne pouvaient pas partir en vacances »explique Marton Balog, directeur de production de cette usine appartenant à la multinationale italienne Prysmian.
Ce lundi 18 juillet, les ouvriers indonésiens sont encore en phase d’apprentissage, mais l’entreprise italienne espère qu’ils pourront être complètement autonomes dans les semaines à venir. « Je n’ai connu la Hongrie que depuis la Coupe du monde de football »avoue sans mal Muhamad Firdaus, un joyeux ouvrier de 22 ans venu de Padang, sur l’île de Sumatra, monter des câbles douze heures par jour dans ce coin reculé d’Europe centrale. « J’adore la Hongrie, les gens sont très gentils avec moi »poursuit ce diplômé en mécanique, qui a même commencé à apprendre la difficile langue magyare.
A ses côtés, Ponton Sijari, 26 ans, est également » très heureux « avoir quitté son Indonésie natale pour la première fois de sa vie « gagner environ deux fois plus ». C’est un peu plus de 600 euros nets par mois, un salaire conséquent pour l’Indonésie, mais qui ne suffit plus à attirer la main-d’œuvre hongroise. « Nous sommes d’abord allés chercher en Ukraine ou en Roumanie, mais nous n’avons pas eu beaucoup de succès, le chiffre d’affaires était trop important, alors nous nous sommes dit que nous allions chercher encore plus loin dans le Sud. -Est-asiatique »explique Tiago Campelo, directeur des ressources humaines de la filiale hongroise de Prysmian.
Salle de prière
Ce Portugais est à l’origine de ce qu’il qualifie prudemment « expérience intéressante » dans ce pays dirigé depuis 2010 par le Premier ministre nationaliste Viktor Orban, connu dans toute l’Europe pour sa lutte acharnée contre l’immigration. Il ne cache pas avoir pris les plus grandes précautions pour éviter les mauvaises réactions : les Indonésiens sont hébergés à une heure de route, à Szeged, ville étudiante qui accueille déjà des étrangers, et un interprète est présent tous les jours sur le site.
La direction a également organisé des réunions avec les ouvriers hongrois pour leur expliquer toutes les différences culturelles, notamment pourquoi elle a décidé d’ouvrir une petite salle de prière musulmane. Selon les travailleurs de Prysmian, ces précautions portent leurs fruits. « L’usine a tout fait pour qu’ils se sentent bien, il n’y a pas de problème, sauf la langue », accueille par exemple Tibor Szögi, 48 ans, qui travaille sur les lignes de production depuis neuf ans. Après deux mois d’expérience, M. Campelo ne cache pas son soulagement. « Je m’attendais à plus de résistance »dit celui qui prévoit désormais de faire venir des dizaines d’Indonésiens supplémentaires dans les semaines à venir.
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