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« Je vis avec la maladie de Crohn depuis trente ans et je l’ai toujours caché à mes employeurs », admet Hélène (à la demande des témoins, les prénoms ont été changés). Au début de sa carrière, travaillant dans le secteur bancaire, la jeune fille a fait face à des crises douloureuses et a reçu des remarques telles que: « Tu as l’air vraiment excité. » Puis, lorsqu’elle se recentre sur sa maîtrise en éducation, sa directrice des études refuse d’excuser son absence aux examens en raison de complications de sa pathologie. « Ce n’est pas un cancer ! » »lui lance-t-il. Pas de quoi la faire passer aux aveux lorsqu’elle intègre l’Education nationale.
Mais ces derniers temps, la crise du Covid-19 l’a poussée à s’ouvrir davantage. « Lors de ma première naissance en 2020, on m’a demandé d’enseigner aux enfants des soignants et j’ai dû refuser car j’étais à risque en raison de mon traitement immunosuppresseur », elle explique. Son manager a été assez gentil pour accueillir son rejet sans être intrusif. Helen ne dira rien de plus sur sa pathologie, comme des millions de personnes cachant des problèmes invalidants ou des déficiences sensorielles, cognitives, mentales et même motrices qui peuvent passer inaperçues pendant un certain temps.
La pandémie est peut-être à l’origine d’un nouvel obstacle invisible et difficile à provoquer : le fameux Covid de longue haleine. « Il se manifeste par de nombreux symptômes à long terme tels qu’une fatigue accablante, un brouillard mental, des maux de tête, un essoufflement et une oppression thoracique, des douleurs, une perte de goût et d’odorat, etc. Il affecte très probablement les personnes de moins de 60 ans, donc il est toujours actif même pas dans une forme sérieuse et se sent coupable de ne pas gravir la pente assez vite. », explique le Dr Laurent Ouzan, cardiologue à l’Institut médical de la santé du sport et co-auteur, avec le Dr Nicolas Barizien, Covid depuis longtemps, comment s’en sortir (Marabout, 2021). Certains ne l’assument pas, comme Mathieu, chercheur en biologie du laboratoire de Lyon. « Après mon infection l’année dernière, j’avais l’impression de penser au ralenti pendant des mois. Je n’ai rien dit à mes collègues, mais j’ai eu du mal à faire face et j’ai eu des ennuis sur le projet. »
« Pas à ma place »
Beaucoup veulent éviter la stigmatisation, que ce soit au bureau ou lorsqu’ils postulent pour un emploi. Louise, une jeune ingénieure de 26 ans, dyslexique depuis le primaire, était également recherchée. « Testez-vous » dans le monde professionnel. Elle n’a pas dit un mot de son handicap aux managers de la start-up où elle a effectué un stage après l’obtention de son diplôme. « Ils n’ont pas tardé à me reprocher mes fautes d’orthographe et j’ai dû leur révéler ma dyslexie. Ils ne m’ont pas vraiment blâmé, mais je ne me sentais pas à ma place. » Louise avoue. Idem pour son premier CDD dans un laboratoire de recherche. « Les premiers articles que j’ai rédigés ont attiré l’attention, mais heureusement, mes supérieurs m’ont simplement encouragé à me concentrer sur mes recherches et se sont occupés de terminer la rédaction. » Maintenant, Louise se prépare à commencer à défendre sa thèse. Et après ? « Je ne sais toujours pas s’il est dans mon intérêt de divulguer ma situation à mes futurs employeurs, je ne sais rien de mes droits, avantages ou risques de reconnaissance. » Et même si son défaut est invisible, elle sait qu’il sera difficile de le cacher longtemps, au risque de s’épuiser pour compenser.
Ce qu’il faut faire ? Se taire… ou tout dire ? Si oui, alors quand ? « Il est difficile de répondre à cette question, car chaque situation est individuelle, reconnaît le Dr Rodrigue Delence, spécialiste de la douleur au CHU de Rouen et auteur Mieux vivre avec la fibromyalgie (Leduc, 2018). Avec la même maladie, les gens souffrent plus ou moins sévèrement. Il n’est donc pas nécessaire de systématiser la reconnaissance du handicap, car l’étiquette peut inclure le handicap. Mais minimiser, voire nier, un problème entraîne une surcompensation qui vous expose à une rupture physique, psychologique ou relationnelle. » C’est embêtant d’en arriver là quand on aide des personnes bénéficiant, par exemple, de la reconnaissance du statut d’invalidité (RQTH).
Cependant, il est parfois impensable psychologiquement d’associer sa maladie à un handicap. Véronique Bustrel, directrice de l’innovation, de l’évaluation et de la stratégie de l’Association pour la gestion du Fonds pour l’insertion des personnes handicapées (Agefiph) le note. « Si le handicap s’est généralisé depuis la loi de 2005, les solutions d’accompagnement ne sont pas toujours adaptées aux sensibilités des personnes et à la réalité de leur handicap. Il faut sortir de la logique du bunker, où l’on est soit malade soit en bonne santé, handicapé ou non. Par exemple, il est possible de moduler le temps partiel thérapeutique dans le temps. Cela permettrait au plus grand nombre de l’utiliser sans gêne et d’évoluer à terme vers une reconnaissance décomplexée. »
Sensibilisation
Parce qu’à la fin « L’essentiel est de pouvoir travailler comme tout le monde, malgré le handicap, explique le Dr Lawrence Levy-Amon, médecin du travail. Il ne s’agit pas de pendre quelqu’un, mais de fluidifier la situation en adaptant les horaires et les outils de travail pour compenser les difficultés. Tout cela n’est possible qu’après la constatation du problème, bien sûr, et uniquement sur décision d’un salarié, médecin professionnel, tenu au secret médical. Ce dernier peut cependant être alerté par une personne responsable des difficultés d’une personne qui n’a pas conscience de son handicap, par exemple suite à un trouble neurologique ou un traitement sévère. « Ensuite, nous proposons des évaluations par des experts externes, ce qui contribue à sensibiliser », dit le docteur. Et en cas de refus obstiné ? « L’incapacité de travail peut être déclarée si le travailleur a perdu pied. »
C’est ce que craint Jacques pour son fils Julien, 24 ans, autiste depuis l’enfance. Pour un jeune, ce n’est qu’une difficulté de concentration. « Grâce à son aide et à sa persévérance, il a obtenu un baccalauréat, un IUT en électronique et un emploi dans une petite entreprise qui connaît plus ou moins sa problématique. Mais ça ne durera pas éternellement inquiète le père. Il devrait exiger la protection du statut de personne handicapée, mais il s’y oppose. Après tout, il est heureux pour le moment. » Le moment viendra peut-être de rencontrer un militant des droits de l’homme ou un médecin du travail qui lui ouvrira les yeux sur les bienfaits de la reconnaissance.
Cet article a été rédigé en 3e édité par le Réseau Universitaire des Référents Handicap en partenariat avec l’Agefiph.
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