« A 59 ans, et étant une femme, tu n’as pas trop le choix »déplore Mauricette Carles, qui a travaillé pendant trente-quatre ans comme agent de production à la Société aveyronnaise de métallurgie (SAM), une fonderie automobile située au cœur de l’ancienne vallée sidérurgique de Decazeville (Aveyron). « Je suis allé à l’assistance personnelle, elle dit. Je n’avais pas besoin de formation car je savais comment faire le ménage à la maison. »
Depuis le 8 août, Mimi, c’est son surnom, commence ses journées à 7h45, avale les kilomètres pour se rendre chez les personnes âgées dépendantes, et, à 19h, est enfin rentrée chez elle, épuisée. « Je nourris mes poules et mes chiens, et je me couche parce que je suis rétrécielle soupire. Moralement, c’est difficile. Je pleurniche et il y a des nuits où je ne dors pas bien. Je n’ai plus 20 ans et la vieillesse me touche. Elle me fait peur. »
Le 26 novembre 2021, après de nombreux rebondissements, le tribunal de commerce de Toulouse a définitivement scellé le sort de cette société fondée en 1973, en décidant l’arrêt immédiat de son activité. Comme les quelque 330 autres employés, Mimi a été licenciée. Dans le cadre du fonds spécial pour la reconversion des salariés de l’automobile, décidé en 2021, elle aurait pu bénéficier du rachat de trimestres pour partir en préretraite. Cependant, ce n’est pas le cas.
« Deux licenciements en un an »
« Même si j’ai tous mes quartiers, il me manque 5 000 euros de cotisation, elle explique. Je n’ai pas validé ma longue carrière. J’ai donc pris le taureau par les cornes en signant un contrat de six mois. » Pour se donner du courage, elle relativise : « Je ne suis pas le plus à plaindre. J’ai un travail, je suis payé et je ne serai pas long. » Parmi les anciens salariés, 205 ont retrouvé le chemin de l’emploi ou de la formation. Mais seuls 57 d’entre eux ont signé un CDI.
« C’est insuffisant »regrette Ghislaine Gistau, ancienne responsable qualité et représentante de la CGT, qui a rejoint la SAM il y a vingt-sept ans. « Pourtant, on nous a dit et redit que ça n’allait pas être compliqué de trouver un CDI »peste celle qui a déjà commencé sa phase après le SAM : depuis le 1euh Septembre, elle est employée dans une administration, pour une durée de trois ans.
Le lien entre les anciens salariés de la fonderie n’est pas rompu. La SAM Foundry Association, qui Mmoi Gistau préside depuis sa création en janvier, permet le maintien d’un contact fraternel. Samedi 12 novembre, l’association organisait un apéro concert à la salle des fêtes de Boisse-Penchot, village de 500 habitants à huit minutes en voiture de Decazeville. « Mon Dieu, ça fait du bien, se souvient Mimi, qui sourit à nouveau. Nous nous sommes sautés dans les bras l’un de l’autre. Nous avons ri. J’en ai profité. Ça fait terriblement bien, parce que mes collègues, je les aime. »
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