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« Personne ne m’a appelé, nous n’avons même pas reçu les condoléances d’Eiffage ou de la Société du Grand Paris. Pas un mot. » Karine Michel a perdu son frère Franck le 7 mars, sur l’un des chantiers de construction de la ligne 16 du métro d’Ile-de-France, dans le cadre du projet du Grand Paris Express (GPE).
Chauffeur de 58 ans, envoyé par sa société vosgienne, mandaté par un fournisseur du groupe d’entreprises dirigé par Eiffage, il est décédé au Blanc-Mesnil (Seine-Saint-Denis), à la suite d’un choc avec une lourde charge. « Alors qu’il rebâchait son camion après avoir déposé sa livraison, une personne qui n’y était pas autorisée a utilisé un engin de levage, et la charge est tombée. Je ne veux pas que mon frère soit juste un autre sujet d’actualité, la société ne répondant pas et un jeune de 20 ans mourant l’année prochaine. »
Depuis 2020, l’inspection du travail a recensé 18 accidents graves. Le décès de Franck Michel est le quatrième sur les chantiers du GPE, lancé en 2016. Les très nombreux métiers présents sur ces chantiers colossaux conjuguent pénibilité et risque. Ali Tolu, délégué syndical CGT et traceur chez Vinci, cite pêle-mêle les « problèmes de dos, tendinite, froid en hiver, chaleur en été, pollution, stress des délais, risque de chute de hauteur, travail le samedi, que l’on appelle désormais « vendredi bis » donc il est courant d’y travailler ».
« Au moins un audit annuel par site »
Pourtant, la construction de 200 kilomètres de nouvelles lignes de métro, employant près de 8 000 personnes, se voulait exemplaire. « La sécurité de ces chantiers était une priorité dès le départassure Bernard Cathelain, membre du directoire de la Société du Grand Paris (SGP), avec notamment une charte de sécurité, mise à jour onze fois depuis 2016, que toutes les parties prenantes s’engagent à respecter, sous peine de sanctions. Il y a au moins un audit annuel par site, afin de signaler d’éventuels dysfonctionnements. »
Dès qu’il y a une situation dangereuse, le chantier est arrêté, selon la SGP. « Dès le lundi suivant le décès de Franck Michel, de la part du groupe, il y a eu une obligation d’un quart d’heure sécurité, une discussion avec tous les salariés qui travaillent sur les différentes opérations, avec une minute de silencedécrit un délégué syndical chez Eiffage Construction. C’est largement insuffisant. »
Malgré les mesures de prévention, les risques et accidents graves restent essentiellement dus au modèle économique du secteur de la construction qui fait largement appel à la sous-traitance et au travail intérimaire. Selon une analyse publiée en mars par la direction, recherche, études et statistiques, le risque d’accidents du travail est plus important chez les sous-traitants et les établissements faisant appel à des intérimaires.
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