les autorités françaises dans le piège du « chantage à l’emploi »

les autorités françaises dans le piège du "chantage à l'emploi" – Thebuzzly

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Paper Excellence est un groupe canadien qui a racheté en 2010 deux usines de pâte à papier en France, à Tarascon (Bouches-du-Rhône) et Saint-Gaudens (Haute-Garonne), via sa filiale Fibre Excellence, et se bat depuis pour poursuivre leur activité. Tout cela dans un marché mondial hautement concurrentiel et face à des normes environnementales de plus en plus strictes. Équation difficile.

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Quoi qu’il en soit, c’est l’histoire telle que la raconte Fibre Excellence. Ce que le groupe ne dit pas, c’est qu’il est en réalité contrôlé par le riche indonésien Asia Pulp & Paper (APP), comme le démontre l’enquête « Deforestation Inc » menée par Le monde avec le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ).

Ces révélations apportent un éclairage nouveau sur les négociations en cours entre Paper Excellence et les autorités locales et nationales. Depuis une dizaine d’années, le papetier bénéficie d’une certaine indulgence de la part des pouvoirs publics, malgré plusieurs manquements à ses obligations environnementales et fiscales, au nom de la préservation de l’emploi. Mais est-il vraiment le bienfaiteur qu’il prétend être ?

« Deforestation Inc. », une enquête internationale

Arrêter la déforestation d’ici 2030. C’est l’engagement pris par une centaine de pays lors de la COP26 en Ecosse, fin 2021, mais sa réalisation reste très incertaine. Des failles dans la réglementation, des fabricants et des certificateurs peu scrupuleux… L’international « Deforestation Inc. » révèle les mécanismes qui rendent possible la prédation environnementale. Cent quarante journalistes d’une quarantaine de médias partenaires au sein du Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ), dont Le mondetravaillé sur ce projet.

Premier pollueur, dernier payeur

Un exemple illustre bien les pratiques agressives du groupe. L’usine Fibre Excellence de Tarascon (Bouches-du-Rhône) rejette de grandes quantités de polluants dans l’eau, en raison des procédés utilisés pour blanchir sa pâte à papier, notamment par l’utilisation de chlore – c’est d’ailleurs l’un des sites suspectés d’« éternel polluants » (PFAS), selon une enquête récente de la Monde. En vertu du principe du pollueur-payeur, le site doit verser à l’agence de l’eau Rhône-Méditerranée-Corse la redevance de pollution industrielle la plus élevée, entre 2 et 3,5 millions d’euros par an.

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Depuis le rachat de l’usine par le groupe canadien, le constructeur rechigne à payer son dû. « Les relations étaient extrêmement tendues. Ils ont tout fait pour contester leur impôt », indique Laurent Roy, directeur général de l’établissement public. Fibre Excellence parvient à Annuler sa contribution pour l’année 2011 devant les tribunaux pour vice de forme. De 2012 à 2017, la filiale française refuse de la payer, jusqu’à ce qu’elle accumule 17,3 millions d’euros de passif.

Paper Excellence fait pression sur les autorités, menace de fermer son site. Décrit par certains comme authentique « chantage à l’emploi », cette stratégie fonctionne. L’agence de l’eau lui propose un arrangement : en échange d’engagements environnementaux, l’entreprise ne paiera que la moitié de son ardoise dans l’immédiat, puis 1 million d’euros par an jusqu’en 2025. Le site de Tarascon verse alors un peu plus de 8 millions d’euros et commence à convertir ses production en pâte à papier écrue, avec un procédé moins polluant. « Ce qui nous importait à l’époque, c’était de récupérer la plus grande part possible de la redevance [non payée] »argumente Laurent Roy.

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