PAu-delà du clivage entre ceux qui sont favorables à l’allongement de la vie active à 64 ans et ceux qui s’y opposent, un consensus se dégage entre les deux camps sur la faible attractivité du travail en France. Les partisans de la réforme s’en inquiètent à juste titre, car une prolongation économiquement rentable et socialement acceptable de la vie professionnelle n’est possible que si le travail est attractif du début à la fin d’une carrière. Certains opposants aussi, notamment les syndicats, dont la raison d’être est la qualité de vie au travail (QVT), quel que soit l’âge légal de la retraite.
Depuis une trentaine d’années, la perte d’attractivité du travail pour les Français, notamment les plus jeunes d’entre eux, a été très marquée selon tous les sondages réalisés sur la question, le Covid-19 ayant amplifié le phénomène. Le désenchantement au travail se traduit aussi par l’éclosion de concepts tels que « la grande résignation », « la perte de sens » ou la « arrêt tranquille ».
L’insatisfaction au travail, dont le spectre est large, de la souffrance au travail au manque de considération, se mesure concrètement au travers d’indicateurs sociaux tels que l’absentéisme, les maladies professionnelles, le turnover excessif du personnel (difficultés à recruter et à fidéliser), les défauts de qualité et les -la productivité causée par le désengagement.
Des recherches montrent que ces indicateurs sont particulièrement dégradés en France dans la plupart des entreprises, quelle que soit leur taille, ainsi que dans les organismes publics, alors qu’ils sont meilleurs dans des pays comparables, notamment la Suède, l’Allemagne ou le Canada (Maîtriser les coûts cachés et les performances, par Henri Savall et Véronique Zardet, Economica, 2020).
gestion de proximité
Au final, le manque d’attractivité du travail entraîne des pertes colossales de valeur ajoutée, le plus souvent masquées par les systèmes d’information comptables traditionnels. Les « coûts cachés » du manque d’attractivité du travail peuvent s’élever, selon les recherches, à 20 000 euros par personne et par an, dont 35 à 55 % sont récupérables grâce à une satisfaction professionnelle retrouvée. Agrégé au niveau macroéconomique, cela représenterait une amélioration de 4 à 8 points du produit intérieur brut annuel.
Face à ce constat, deux choix de société s’offrent à nous. La première consiste, s’il est vrai que le travail est » prison « , pour chercher à le réduire. Le gros problème est que le travail reste, jusqu’à preuve du contraire, le seul facteur actif de création de valeur pour financer les systèmes de protection sociale ainsi que la fabrication des produits et services nécessaires à l’expansion des besoins humains (santé, éducation, logement, sécurité, judiciaire, etc).
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