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François Berlean vient à notre rendez-vous avec un casque de vélo vissé sur la tête. « Il n’y a pas d’autre moyen de se déplacer dans Paris aujourd’hui ! », justifie l’acteur. Aujourd’hui, à seulement 70 ans, il est partout. A l’écran comme sur les planches. Il est actuellement montré dans Au bout du nez comédie sur le pouvoir avec Antoine Duléry au Théâtre Libre de Paris. Elle parrainera également en juin le premier Festival du film français d’Aix-les-Bains.
Malgré son succès, il n’a pas oublié d’où il vient. La célébrité lui est venue tardivement, vers 45 ans, grâce à son rôle dans le film. Septième ciel (1997) Benoît Jacot, puis ma petite affaire (1999) de Pierre Jolivet, qui lui vaut le César du meilleur second rôle masculin. L’acteur a grandi dans une famille « mixte », entre une mère catholique et un père juif. Il se remémore ses difficultés avec la lecture, son adolescence angoissante, ses années en école de commerce, dont il avait des amis très proches, et son amour pour les pages économiques des journaux. Il revient également sur ses débuts dans la publicité, interrompus par sa passion pour le théâtre.
« Mon père a commencé à fabriquer de vieux étuis de téléphone en velours doré. C’était terrible, mais ça a marché ! »
Dans quel environnement avez-vous grandi ?
Ma mère venait d’une famille catholique. Mon père, juif russe d’Odessa (Ukraine), médecin diplômé, n’avait pas un sou quand il est venu en France en 1928. Il devait le faire lui-même. Il trouve un petit atelier rue Michel-le-Comte, au cœur du Marais, le quartier le plus pauvre de Paris à l’époque, où il commence à sculpter le bois. Le loyer lui coûtait 50 francs par mois, ce qui me paraissait une fortune. De plus, il n’y avait même pas d’eau chaude. J’y ai passé ma petite enfance. Ensuite, nous avons déménagé dans un appartement de deux pièces avec salle de bain, avenue de Versailles au 16.e avant de déménager à Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine) quand mon père a commencé à confectionner des étuis de téléphone en velours vieil or. C’était terrible, mais ça a marché ! Pendant l’été, je passais mes vacances chez ma grand-mère à Saint-Jean-de-Luz (Pyrénées-Atlantiques), où j’ai été conçu. Je ne sais pas, c’est peut-être pour ça, mais j’aime le Pays basque. Pour moi, c’est la plus belle région de France.
Quel genre d’enfant étiez-vous ?
J’étais très inquiet. Un soir, alors que j’avais 11 ans, mon père, un peu alcoolique, m’a dit au cours d’un dîner bien arrosé : « De toute façon, tu es le fils de l’homme invisible. Quand je regardais le feuilleton à la télé, j’ai vraiment pris sa blague au pied de la lettre. Peu à peu, j’ai développé une sorte de paranoïa, de schizophrénie. Dans le métro, dans le bus, il parlait tout seul, faisait des grimaces aux passagers. La nuit, je concoctais toutes sortes de scénarios, comme aller à la banque chercher une montagne de billets et de lingots d’or et les partager ensuite avec les pauvres, les amis et ma famille, ou infiltrer l’Elysée pour accéder à des dossiers secrets. J’ai même inventé la trisomie. Cette petite comédie, que j’ai jouée seule, m’a valu plusieurs rencontres avec des psychologues jusqu’à la fin de ma dernière année d’études. Mais ça m’a aussi permis, en principe, d’avancer dans ma carrière, puisque j’avais déjà l’habitude de jouer un rôle.
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